L’ÉCO DU MARDI | Le business incertain des paillotes
Elles sont 22 paillotes à se partager le littoral du Grau-du-Roi. Installées sur le domaine public, l'Etat leur accorde des concessions renouvelables tous les cinq ans. Mais les appels d'offre sont nombreux, et la concurrence accrue.
Timothée, jeune pêcheur de telline et Geoffrey saisonnier, ont tenté l'expérience l'année dernière en postulant pour une concession située non loin du Seaquarium. Candidature acceptée par la mairie qui leur accorde 750 m2 de plage. Mais après l'adrénaline des débuts, les deux associés de l'Estuaire Plage doivent faire face à un été 2014 catastrophique.
"Tous les weekends, la météo annonçait de la pluie. Les plages étaient vides et les chalutiers ne partaient pas en mer. On a failli lâché" reconnait Timothée.
Car, au delà des difficultés climatiques, Timothée et Geoffrey se sont imposés une règle d'or : ne proposer que des produits frais. Une contrainte supplémentaire qui fait pourtant leur succès aujourd'hui.
"C'est ce qui nous a sauvé. Toutes les paillotes se ressemblent un peu. Nous, on voulait une ambiance camarguaise, que cela ressemble à une cabane de gardian."
Investissement.
Pour les deux jeunes graulens, ne pas compter ses heures semble être le mot d'ordre. Bien qu'ouvert seulement du 1 er mai au 30 septembre, la mise en place d'une plage privée nécessite du travail en amont : deux mois de préparation avant l'ouverture, et deux mois après la fermeture. L'érosion du sable et du sel auront raison de beaucoup de matériel, les investissements sont chaque année considérables. Timothée et Geoffrey ont réalisé 10 000 euros de frais d’électricité lors de leur première installation. "Il faut toucher à tout, pour limiter les coûts."
"Faire venir les montpelliérains"
Pour Carine Bouscharain : "Il faut un sacré courage pour démarrer une paillote aujourd'hui."
La gérante de la plage des Artistes, véritable institution locale depuis 25 ans a vu les changements opérés. Une réglementation plus stricte, une clientèle plus exigeante, et des investissements incertains. Car tous les cinq ans, c'est le même rituel, rien ne certifie que sa concession sera reconduite. "On s'est adapté au marché avec une cuisine et une décoration plus soignée." Exit les soirées mémorables que connaissait le lieu il y a encore une dizaine d'année. Désormais, une seule soirée par saison est autorisée. Des paillotes de sa taille, soit 1 000 m2, il en existe quatre autres au Grau-Du-Roi : la baie du Roi, la Désirade, le M, et les Pieds Nus. Cette dernière a connu un changement d'exploitant l'année dernière, mettant à la porte l'ancienne famille qui gérait le lieu depuis une dizaine d'année. Une législation impitoyable et un cahier des charges compliquée qui ont aussi permis de freiner l'installation anarchique d'infrastructure sur le littoral.
"Je suis pour que les plages travaillent, c'est notre force si on veut faire venir les montpelliérains au Grau-Du-Roi" explique Carine.
La vraie concurrence est ailleurs, sur la plage du Grand Travers de la Grande Motte et ces paillotes qui bénéficient d'horaires d'ouverture plus larges.Mais la gérante de la plage des Artistes ne désespèrent pas et reconnait "une saison 2015 exceptionnelle. Je n'ai jamais vu ça depuis 20 ans." Les raisons de cette fréquentation en hausse, le beau temps mais pas seulement : "peut-être qu'on est de plus en plus bons" plaisante Carine.